"Les machines de soudure laser sont désormais industrielles et fiables"
Directeur général de la société Laser Cheval, Emric Verwaerde détaille la technologie laser. Une technologie de haute précision où les innovations sont constantes. Pourtant, elle a n’a pas encore conquis tous les secteurs industriels pour lesquels elle est porteuse de performance grâce, notamment, à la soudure laser.
Pouvez-vous expliquer comment fonctionne le soudage laser ?
Emric VERWAERDE : Le soudage laser repose sur l’utilisation de la lumière pour chauffer et faire fondre la zone à souder, appelée "le joint". Cette lumière provient d’un laser, acronyme de Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation (amplification de la lumière par émission stimulée de rayonnement). En d’autres termes, le laser convertit de l’énergie en lumière, qui est ensuite amplifiée optiquement. Cette lumière, dont la longueur d’onde (ou couleur) dépend du matériau utilisé pour la générer, peut varier de l’ultraviolet à l’infrarouge.
Laser Cheval utilise des sources en infrarouge proche (+/-1060nm). Cette longueur d’onde permet d’obtenir des puissances élevées et est adaptée à la plupart des métaux, y compris ceux à forte réflectivité (comme l’or ou l’aluminium), grâce à une densité de puissance élevée.
Quels sont les avantages et les limites du soudage laser par rapport aux techniques à l’arc (en termes de matériaux, performances, qualité de soudure, etc) ?
Emric VERWAERDE : Le laser n’est pas un véritable concurrent des procédés traditionnels, mais plutôt un complément, avec plusieurs avantages :
- Précision élevée : Le faisceau laser peut être focalisé sur une surface très réduite (D.25µm), permettant des soudures de haute précision, même dans des zones difficiles d'accès.
- Vitesse : Le soudage laser est extrêmement rapide, en particulier lorsqu'il est associé à des scanners, ce qui le rend très efficace pour les applications industrielles avec des vitesses allant de 20 à 100 mm/s.
- Moins de déformations : Grâce à la vitesse élevée et à un faible temps d’interaction entre le laser et la matière, la zone affectée thermiquement est réduite, limitant ainsi les déformations des pièces.
- Qualité de soudure : Les soudures réalisées au laser sont généralement de meilleure qualité et nécessitent peu de post-traitements. Ce procédé permet même d'obtenir des soudures invisibles lorsque l’aspect esthétique est un critère important.
- Automatisation : Le soudage laser est facilement automatisable, ce qui le rend parfait pour les productions en masse.
Depuis quand le laser est-il utilisé pour le soudage, et quand les premières solutions industrielles ont-elles vu le jour ? Quelles sont les industries qui utilisent cette technique aujourd’hui ?
Emric VERWAERDE : Le soudage laser est une technologie relativement récente, avec des applications industrielles datant de plus de 50 ans. Laser Cheval a vendu sa première machine de soudure dans les années 80, principalement pour la bijouterie, et au cours de cette même décennie, cette technologie s’est développée, notamment dans les télécoms et l’électronique, en plus du secteur du luxe.
Aujourd’hui, le soudage laser est utilisé dans de nombreuses industries. En ce qui concerne Laser Cheval, nous fabriquons près de 10 machines de soudure laser par an, destinées aux secteurs du luxe, du médical, de l’électronique, etc.
Quels sont les différents types de lasers utilisés pour le soudage, ainsi que leurs avantages et inconvénients ?
Emric VERWAERDE : Concernant le matériel, le principal composant est la source laser, choisie en fonction de la longueur d’onde nécessaire pour optimiser l’absorption des matériaux à souder, mais également en fonction de son coût. Par exemple, si une longueur d'onde est deux fois plus efficace mais cinq fois plus coûteuse à produire ou exploiter, il vaut mieux privilégier la première et augmenter la puissance.
C’est notamment pour cette raison que Laser Cheval se concentre sur l’infrarouge proche, car cette longueur d’onde est économique et facile à produire.
Le faisceau laser est ensuite transporté par fibre optique, ce qui simplifie son intégration et son entretien. Concernant la structure des machines, il en existe principalement deux types : celles où la pièce se déplace par rapport au laser et des machines scanners où le laser se déplace sur la pièce à l’aide de 2 miroirs montés sur des moteurs galvanométriques.
Étant donné que la technique de soudage laser est moins répandue que d’autres techniques de soudage, comment formez-vous les soudeurs à cette technologie ?
Emric VERWAERDE : Les formations en soudage laser sont relativement rares en France, mais les principes de base restent les mêmes que pour les autres techniques de soudure, les lois physiques étant identiques. Nous recrutons donc des techniciens ayant une formation en mécanique et en métallurgie. Si ces techniciens n'ont pas d'expérience en soudage laser, nous pouvons leur fournir une formation en interne. Chaque année, nous formons une cinquantaine de clients à l'utilisation des machines laser.
Sur quels axes de recherche et développement vos efforts se sont-ils concentrés ces dernières années ? Pouvez-vous nous parler de vos dernières innovations et de l’évolution de votre offre en soudage laser ?
Emric VERWAERDE : Ces dernières années, nous avons concentré nos développements principalement sur deux axes :
- Technique : Nous avons travaillé sur de nombreuses innovations, en particulier pour réaliser de la micro-soudure avec des contraintes spécifiques, telles que la « soudure invisible sur des pièces en or », la « soudure étanche de membranes fines », ou encore la « soudure de petits-fils sur des contacts ». Ces recherches ont impliqué des tests de matériel (types de sources, fibres, protection gazeuse, etc.) ainsi que des développements de processus (parcours, maîtrise des températures, mise en position, etc.).
- Pilotage des machines : En parallèle, nous avons perfectionné des outils logiciels pour rendre la technologie encore plus accessible. Cela inclut des outils visant à faciliter le paramétrage des machines et l’automatisation des processus, avec, par exemple, l’introduction de l’assistance vidéo.
Comment envisagez-vous l’évolution du marché du soudage laser dans les prochaines années (automatisation/robotisation, nouvelles applications et industries intéressées…) ? Existe-t-il encore des obstacles à son déploiement ?
Emric VERWAERDE : Le principal frein au développement du soudage laser reste une connaissance insuffisante de cette technologie dans les bureaux d’études. Comme pour toutes les technologies, la soudure laser n’est réellement efficace que si le design des pièces est adapté à cette méthode. Trop souvent, elle est utilisée comme un recours tardif, une fois que les autres techniques ont échoué.
Cependant, aujourd’hui, la soudure laser offre de nombreux avantages et devrait être envisagée dès la phase de conception, à l'instar des autres procédés d’assemblage. Les machines de soudure laser sont désormais industrielles et fiables, et leur utilisation va continuer de se simplifier. Les coûts ont diminué et continuent de baisser. De plus en plus d'acteurs, comme Laser Cheval, sont capables de développer des machines et des processus de soudage laser. Ainsi, le marché va continuer à croître.
